Qui es-tu, Whitney ?

Et si Whitney Houston n’était pas morte noyée dans sa baignoire le 11 février 2012. Serait elle ringardisée et huée comme elle le fut lors de sa dernière tournée, ou adulée comme une icone des années 80 ?

« Mon film, c’est un peu Kevin qui tente de comprendre Whitney. Et je me suis rendu compte que personne ne la connaissait vraiment. »

La sortie en salle, ce mercredi 5 septembre, du documentaire de Kevin Macdonald consacré à Whitney, ravive la flamme pour celle qui fut l’icone afro américaine de plusieurs générations, première artiste féminine solo à avoir aligné les numéros 1 dans les charts et les récompenses de platine. Pour les grands enfants comme moi qui n’ont pas connu la star à l’apogée de sa carrière, ce documentaire relativise voire éclipse de notre esprit, les images marquantes de Whitney huée par ses fans lors de son concert retour à Brisbane en Australie début 2010. L’artiste apparaît alors très fatiguée, sa performance laissant à penser qu’elle a perdu son talent d’antan et que ses prouesses vocales ne sont plus qu’un beau souvenir. En réalité Whitney est atteinte d’une infection des cordes vocales. En réalité Whitney est fauchée (dans le documentaire on apprend qu’elle a notamment été volée par son père alors qu’il était son manager), elle a besoin d’argent et voit cette tournée comme le come-back de la dernière chance. Même si ses addictions lui ont fait perdre de sa superbe, Whitney est bien là, toujours aussi belle et joyeuse.

La fin de l’histoire de Whitney est connue de tous, et ce n’est pas une fin heureuse. Le réalisateur a ‘enquêté’ pendant deux ans sur la personnalité de celle que ses proches appelaient Nippy. Grâce aux témoignages de son entourage – sa mère, ses frères, manager, maison de disque, producteurs, agents, réalisateurs… – aux images d’archives, aux images personnelles tournées par son amie et amante Robyn, et aux interviews audio, on en apprend davantage sur l’enfance, la carrière et la vie amoureuse de la chanteuse. A quel moment exactement les choses ont mal tourné ? on pourrait incriminer beaucoup de personnes, pointer du doigts l’alcool et la drogue, mettre en cause la femme qui l’a abusée sexuellement alors qu’elle n’était qu’une enfant (il s’agit de sa cousine la chanteuse de soul Dee Dee Warwick). Cet abus, dont a également été victime son frère, constitue l’une des révélations majeures de ce documentaire projeté lors du dernier festival de Cannes. Le réalisateur aborde les événements et la carrière de Whitney de façon chronologique, de son enfance à son décès dans un hôtel de Beverly Hills. Il superpose aux images de Whitney des images d’archives, des publicités, des flash infos, des extraits de films pour contextualiser : Coca Cola, Michael Jackson, Madonna… A cette époque, l’acteur Ronald Reagan devient Président des Etats-Unis, le pays s’impose comme puissance internationale incontestable.

La carrière solo de Whitney commence en 1985 avec la sortie de son premier album intitué Whitney Houston. Nippy qui était jusqu’alors choriste pour sa mère, la chanteuse de soul Cissy Houston, passe de l’ombre à la lumière. Mais Nippy est bien plus fragile que Whitney, pur produit d’une Amérique qui cherche ses icônes et adule sans retenue et sans pitié. Whitney a « ce don de Dieu, cette mission » et ne peut échapper à sa destinée. Elle est d’abord mannequin puis chanteuse, actrice, réalisatrice. Elle travaille en famille avec ses frères, sa mère, son père. Se constitue autour d’elle un noyau solide de personnes qui l’épaulent mais la maltraitent aussi en l’empêchant de se vivre comme elle est vraiment. Les images d’elles sont lisses et magnifiques, mais les pailettes cachent bien des angoisses et des tourments. Son mari le rappeur Bobbi Brow la mènera profondément dans l’addiction. Leur fille ne survivra pas à l’environnement toxique dans lequel elle a grandi. Bobby Kristina Brown décède en 2015 des suites d’une noyade, dans les mêmes circonstances que sa mère. Ce documentaire n’est pas sans rappeler celui consacré à Amy Winehouse réalisé par Asif Kapadia en 2015. Dans les deux cas il n’y a évidemment pas de happy end. Souvenons nous que Whitney était l’une des premières STARS de l’Amérique d’Oncle Sam.

« Elle a vendu 200 millions d’albums. Elle détient le record du plus grand nombre de numéros 1 consécutifs. Sa chanson « I Will Always Love You » est le single le plus vendu par une chanteuse. Derrière les records, les rumeurs, les scandales, les secrets et la gloire, voici la vraie Whitney. »

Crédit photo ARP Sélection et Warner Bros. France