Melody

Réalisé par Bernard Bellefroid. Écrit par Bernard Bellefroid, Carine Zimmerlin. Avec Lucie Debay, Rachael Blake, Don Gallagher. Belgique. 92 minutes. Sortie française le 06 Mai 2015.

Le film contient une idée de base : et si une mère porteuse (Lucie Debay) vivait avec la femme qui désire l’enfant attendu ? Pendant une heure – après avoir passé la première demie-heure d’installation des détails – l’intrigue se déroule majoritairement dans la grande maison de celle qui désire l’enfant (Rachael Blake). La mise en scène de Bernard Bellefroid fait rapidement comprendre que tout va se jouer à l’intérieur de cette maison. C’est en quelque sorte le cordon ombilical entre les deux protagonistes. Comme si, à chaque nouvelle situation, la maison est ce détail qui empêche une séparation entre les deux femmes. De portes fermées à une architecture invisible, cette habitation est le noyau d’un vas et viens incessant entre les émotions des personnages.

Entre moments de tendresse, de bonheurs, de querelles et de chantages menaçants : le film montre que tout est possible à chaque instant, dans chacune des pièces. En quelque sorte, la maison – aux murs blancs somptueux et cliniques – est le point de naissance et de renaissance des affects qui parcourent le film. Ce qui permet au cordon ombilical (cette maison) de ne jamais se couper (s’écrouler dans une présence solitaire) est le bébé tant attendu. Plus les mois avancent, plus la relation entre les protagonistes prendra de l’ampleur. Même si les affects restent les mêmes, avec les mêmes possibilités de causes, Bernard Bellefroid met en scène une dynamique grandissante entre les deux femmes. Plus le film avance, plus la relation deviendra proche. Le bébé et la maison vont finir par se confondre dans leur intérêt : la naissance et la renaissance d’un sentiment de besoin de l’autre pour vivre, pour progresser.

Cependant, la maison a ses limites dans la mise en scène. Même si son architecture reste invisible tout au long du film, les acteurs sont assez statiques. Même la caméra manque cruellement de mouvements. Tout ceci se ressent dans le cadrage, le plus souvent rapproché des acteurs. Les dialogues sont certes rigoureusement percutants, mais les corps n’ont que trop rarement la possibilité de s’exprimer. Quand un rapprochement est possible entre les deux personnages, le découpage ne permet de le saisir dans sa totalité. Il manque à ce film des instants de pause, pour que les personnages puissent souffler au-delà de la plage. Parce que, même la plage semble appartenir à la propriété où se situe la maison. Avec les vagues qui s’échouent sur le sable, les personnages sont toujours aussi coincés dans ce noyau blanc clinique.

La seule ouverture que le film laisse entrevoir, vient de l’intérieur des personnages. Même une fuite, avec une fenêtre ouverte, est cadrée de l’intérieur de la maison. Comme si, par l’absence soudaine d’un corps, l’esprit du personnage est toujours en train de hanter l’endroit (pour se l’imaginer, bien entendu). Ainsi, les rêves des protagonistes ne peuvent prendre leur envol. Car le seul moyen de s’échapper de ce cordon ombilical beau mais envahissant, est l’abandon à soi-même. D’où ce plan sur la fenêtre ouverte cadrée de l’intérieur, suggérant que la relation construite a conduit à un affect trop rongeur. Les désirs des personnages s’évanouissent au fur et à mesure du film, pour disparaitre totalement de l’intrigue, et ainsi explorer les rêves par la solitude.

2.5 / 5