Money - Suicide Songs : grandeur et beauté musicale

Honnêtement, on pourrait passer des heures à disserter sur Money, exposant sans relâche des arguments pour tenter de convaincre qu’il s’agit de l’un des meilleurs groupes de la génération actuelle (peut-être aussi l’un des plus méconnus ou sous-estimés). C’est un état de fait, le trio confirme avec son deuxième album, Suicide Songs, qu’il trace un sillon rare et exigeant où la musique et les mots sont au service des émotions, de la manière la plus artistique possible.

Qu’est-ce qui fait la force des Mancuniens ? Sans doute un esprit bien à eux, que l’on ne retrouve pas dans d’autres groupes. Cette façon d’habiter chaque composition, de lui imprégner la beauté de la mélancolie ou du désespoir, cette impression d’être à bout de force sur chaque chanson. Évoquer un sentiment, faire passer une émotion à tout prix, comme si c’était la dernière fois que l’on écoutait de la musique et qu’il s’agissait du message le plus important au monde à diffuser.

En fait c’était déjà le cas sur The Shadow Of Heaven, le premier album de Money. Rien n’a changé avec Suicide Songs, qui partage cette même empreinte fantomatique pleine de réflexion sur la vie et la mort, où la voix implorante glace parfois l’auditeur isolé, où les frissons parcourent le corps à mesure que les titres proposent des envolées musicales grandioses ou des cris proches du malaise. Des chansons épiques, Suicide Songs en offre encore, faisant par exemple volontairement traîner son Night Came (huit minutes trente-cinq) en descente vertigineuse jusqu’à l’épuisement.

Et puis surtout Money, c’est un rendez-vous avec Jamie Lee. Cette voix, cette position de martyr, ses complaintes répétées, religieuses, poétiques. Certes, il ne change quasiment jamais de registre, mais il en viendrait presque à manquer lorsque les titres sont un peu trop instrumentaux (Hopeless World). Cette posture d’écrivain musical, ce Baudelaire moderne en quelque sorte (même s’il se verrait plutôt en Bob Dylan), rend le groupe exceptionnel. En mode rien à foutre jusqu’au bout, c’est bien lui qui pose nu sur la pochette de leur tout premier single en 2012, une kalachnikov brandie au-dessus de sa tête (NSFW) ; c’est bien lui qui est sur la couverture de ce nouvel album, un couteau planté sur le front (tiens, il a grossi depuis). Pourtant Lee ne se veut ni dépressif ni provocant, semblant toujours étonné des réactions provoquées. Et c’est sans surprise que l’on lui découvre aussi un air d’éternel insatisfait. Pour lui, leur premier album (5 étoiles, note maximale) n’était pas si bon que cela, et Suicide Songs serait beaucoup mieux. Honnêtement, il est tout aussi magique, et l’on se demande encore ce qu’il leur faut de plus.

5 / 5
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