Coeur de Pirate – Roses

En 6 ans, Béatrice Martin dite Coeur de Pirate a su s’imposer du haut de ses 25 ans sur le devant de la scène francophone. Nouvelle venue du Québec et bien devant ses compatriotes déjà présentes ici. Loin d’une Céline Dion ou d’une Natasha St-Pier, Coeur de Pirate a adopté en un album (éponyme, sorti en 2009) un style doux, proche des 60s, et épuré (une voix, un piano). Blonde, sorti en 2011, un album plus mûr et réfléchit, continuait dans cette lancée. Après un album de reprise pour la télé (Trauma) et la BO d’un jeu vidéo (Child of Light), la belle québécoise revient enfin sur le devant de la scène avec Roses, produit par Björn Yttling.

Le producteur est sûrement la meilleure chose qui a pu arriver à l’interprète. Le premier single diffusé sur les radios, Oublie-Moi, reflète parfaitement l’album : un son plus pop, de l’électro, des synthés. Sans être aseptisé FM, ce nouveau souffle donne une dimension plus jeune et moins sage aux chansons de Béatrice. La production et les arrangements sont superbes, le son électro n’est pas sans rappeler celui de Lykke Li (forcément, c’est le même producteur). C’est aussi le premier album que la chanteuse fera en bilingue anglais / français (4 chansons en français, 7 en anglais). Si certains diront que c’est un choix opportuniste, la langue de Shakespeare apporte une touche de poésie en plus que la langue de Molière ne permet pas toujours.

A la première écoute, on apprécie beaucoup ce renouveau. Si Coeur de Pirate a osé en sortant de sa zone de comfort, malgré ces sons pop, le piano reste bien le coeur de l’album, les autres arrangements se faisant autour. On évite ainsi une routine comme on avait pu le ressentir dans un style très similaire avec les albums de She & Him. Elle ira même jusqu’à un duo avec le jeune rappeur Allan Kingdom sur le superbe titre I don’t want to break your heart, où ces deux styles se marient à merveille.

Roses s’offrent une multitude de sublimes morceaux (Castaway, Crier tout bas, Drapeau blanc), Tu oublieras mon nom, chanson la plus faible, fait presque bande à part, on a simplement l’impression d’écouter une Face B tant elle peut faire redite par rapport à la superbe Place de la République (mélodies et arrangements similaires)

Si tout ça montre bien le renouveau et la maturité de Béatrice Martin, cela se ressent aussi dans ses textes. Quand ses deux premiers albums évoquaient l’adolescence et les histoires de mecs, ici, elle semble être entré dans l’âge de raison. Les paroles y sont plus réfléchies, moins pessimistes, les styles plus élargis, sa voix et son registre vocale murissent. My way back home, écrit pour sa fille Romy, en est le parfait exemple, puisqu’elle y livre une chanson extrêmement positive et se révèle comme être simplement la meilleure chanson de la québécoise.

Coeur de Pirate cherche à se renouveler et le pari et réussi. Roses est une merveille.

5 / 5