Looper

Dans le registre du film de SF intelligent, on avait vu arriver récemment Duncan Jones, réalisateur hautement responsable de MOON et SOURCE CODE. Le genre était donc sauf, et on se demandait d’où pourrait venir la suite. L’opus de l’année dans cette catégorie nous est servi sur un plateau par Rian Johnson, un nom déjà connu pour son film indé’ BRICK (2005), qui révélait à l’époque un certain Joseph Gordon-Levitt (et aussi Lukas Haas et Emilie de Ravin, mais passons). Le monsieur avait donc posé sa première pierre dans une filmographie jeune et pop, il restait à transformer l’essai. Et nous voilà avec ce LOOPER, film de science fiction hautement référentiel, très bien renseigné, qui parvient à nous emmener dans des histoires de voyage dans le temps et de paradoxe temporel avec un certain brio. Complexe mais pas prise de tête, construit et déconstruit, cette histoire à double lecture entre un Joseph Gordon-Levitt désormais en pleine possession de son statut de star, face à un Bruce Willis tenace, a de multiples raisons de vous convaincre.

LOOPER est une tentative de film original. Il faut donc planter le décor, car c’est assez rare d’avoir de vraies histoires ces temps-ci. Le dernier qui a tenté s’appelait Christopher Nolan et nous servait un INCEPTION lui-aussi complexe mais compréhensible. Rian Johnson, scénariste-réalisateur, parvient à faire de même avec dix fois moins de budget. De cette histoire de boucle temporelle où des tueurs sont chargés dans un présent proche d’abattre les victimes de la mafia du futur, le réalisateur s’amuse comme un petit fou. Aller-retour entre les époques, accélération du récit, fausses pistes ou vraies prises de risques, le gamin de BRICK a bien grandi et assume son côté geek. Pas pour autant timide, il sème ses idées sans forcément les faire éclater : LOOPER est un film sans grande scène (ou presque), jouant plutôt la corde des effets efficaces mais sans grande effusion. La preuve avec une superbe scène de torture vécu… de loin. Des idées, voilà ce qui caractérise LOOPER, et si l’ensemble n’est pas toujours très percutant (la faute à une histoire déstructurée, multiple, où certaines parties sont plus efficaces que d’autres), on prend un réel plaisir à suivre ça et à y réfléchir.

Mais pas trop, car les paradoxes temporels pourraient devenir légions. Ce qui n’est pas vraiment un souci avec LOOPER, Johnson arrive habilement à ne pas s’empêtrer les pieds dans son histoire à tiroirs. On suit donc le tout avec une certaine logique, et l’intelligence de la chose est assez impressionnant. On n’avait pas vu de film de genre aussi ambitieux depuis.. INCEPTION. Avec un vieil arrière goût d‘ARMEE DES 12 SINGES (Johnson s’est aussi inspiré de LA JETEE de Chris Marker – la présence de Bruce Willis étant plus qu’un hasard bienheureux, un hommage), le réalisateur joue donc pleinement la carte de la science fiction à l’ancienne, petite histoire très détaillée et qui s’enfonce très loin dans des idées séduisantes. Passé par les séries (il a signé deux épisodes de BREAKING BAD – dont Fly!), Rian Johnson s’est créé son petit espace de jeu, et avec un plaisir dingue. On en redemande aisément!

Critique de Kynerion

Looper est un film malin. Capable d’exploiter la trame du voyage temporel sans sombrer dans les explications tordues et les erreurs, bien interprété (même si le visage de Joseph Gordon-Levitt modifié pour ressembler à Bruce Willis dérange un peu) et qui offre même des scènes mémorables : amputation acharnée d’une victime, fusillade en règle d’un gang, colère d’un enfant…

Pas de chichis dans le scénario et la réalisation. Tout est carré, cadré, limpide. Jusqu’au dénouement final, pas forcément anticipé et pourtant assez évident. La boucle est bouclée.

3.5 / 5
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