La loi de la jungle, une belle galère

Réalisé par Antonin Peretjatko.
Écrit par Antonin Peretjatko, Frédéric Ciriez.
Avec Vincent Macaigne, Vimala Pons, Pascal Légitimus, Mathieu Almaric, Fred Tousch, Jean-Luc Bideau, Rodolphe Pauly, Pascal Tagnati, Thomas de Pourquery.
France
105 minutes
Sortie le 15 Juin 2016

Marc Châtaigne, stagiaire au Ministère de la Norme, est envoyé en Guyane pour la mise aux normes européennes du chantier GUYANEIGE : première piste de ski indoor d’Amazonie destinée à relancer le tourisme en Guyane. De mésaventure en mésaventure, on lui affuble un coéquipier. Pas de chance c’est une pin-up. Pire : elle a du caractère.

Antonin Peretjatko s’est surtout fait remarqué avec son premier long-métrage LA FILLE DU 14 JUILLET, déjà avec Vimala Pons et Vincent Macaigne. Il fait partie de ce que l’on peut mentionner comme une nouvelle vague de cinéastes français, qui ensemble forment un package d’une nouvelle vision du cinéma français. Bouleversement des codes, technique perturbée, etc. On ne va pas lister les idées fascinantes de ce jeune cinéma, mais on doit souligner la continuité dans laquelle s’inscrit Peretjatko avec LA LOI DE LA JUNGLE.

C’est tout à son honneur de faire perdurer son burlesque, bien à lui, qui ne ressemble aucunement à d’autres formes que l’on peut voir ici ou là. Avec une intrigue hors métropole, à la manière du dernier Betbeder, le film de Peretjatko part à l’aventure. C’est alors l’occasion pour lui d’aller plus loin, de repousser les limites de son burlesque. En reprenant le duo Pons / Macaigne, le metteur en scène fait davantage pousser la graine qu’il a semé quelques années auparavant. C’est donc logiquement que Peretjatko mêle avec audace l’aventure et la comédie, où les deux se répondent inlassablement comme des cousins où les codes de l’un sont le moteur de l’autre.

Le long-métrage démarre impécablement, avec un Mathieu Almaric bien seul au milieu de cette population guyanaise qui n’a pas l’air tellement intéressée. La solitude pourrait être l’un des mots clés de cette aventure, comme la compagnie en serait la déstabilisation. Dans cette aventure, et même dans le voyage (que ce soit en avion, en voiture, dans les allées et couloirs de Paris), il y a ce dénominateur commun du rapport au sol : rien ni personne ne semble confortable et convenir à un espace filmé. D’où la longue séquence de la jungle, où Macaigne et Pons finissent coincés.

Même si la « loi de la jungle » est dans le social et dans le politique, elle est surtout dans l’aventure pure. Les métaphores de dénonciation politique abondent, le social est retourné pour prendre un bon coup de pied dans le derrière, mais tout ceci reste en petites touches ici et là. Parce que la longue séquence dans la jungle est apparemment le noyau du long-métrage, ce qui bouleverse le bon cheminement du projet « Guyaneige ». Mais dans cette jungle, Peretjatko confond trop souvent le burlesque et le running gag. La peur du hors-champ (les animaux sauvages, les insectes, des rebelles, …) revient tout le temps. La colère de la désorientation également. Ainsi que ces branches et ces feuilles ou les marécages qui gênent l’avancée des protagonistes. La jungle du long-métrage n’est pas un personnage, elle représente les obstacles sur une piste d’athlétisme qu’il faut parcourir dix fois.

Malgré les zooms tout moches déjà présents dans LA FILLE DU 14 JUILLET qui reviennent ici, il n’y a plus grand chose à se mettre sous la dent. Parce que Peretjatko n’a aucune idée de quoi faire avec sa caméra dans la jungle, à part la filmer comme une aventure désabusée traditionnelle. Sauf qu’avant et après, il arrive à donner de la matière à son burlesque. Comme si le running gag suffisait à justifier la séquence de l’errance dans la jungle : mais non, car Vincent Macaigne cabotine dans chaque scène de cette séquence. Son jeu semble limité à lui-même : Vincent Macaigne fait du Vincent Macaigne, il se caricature lui-même et nous livre les mêmes blagues depuis qu’il a été découvert (je le préfére dans TONNERRE ou dans LA BATAILLE DE SOLFERINO, pouvant être à la fois un ours câlin et un méchant grizzly). A ses côtés, Vimala Pons n’a pas besoin de parler pour être douée : la grâce de ses expressions changeantes permet une sérénité puissante dans ses attitudes / ses postures. Comme si un ange déchu (Pons) rencontrerait un ourson qui boîte (Macaigne).

2.5 / 5
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