Le dernier vice-roi des Indes

La comparaison avec la série britannique INDIAN SUMMERS est assez inévitable. Mais il y a deux différences nettes entre les deux : le film est plus factuel que la série, qui tend davantage à basculer l’Histoire en contexte d’arrière-plan. LE DERNIER VICE-ROI DES INDES sillonne la petite histoire en déroulant la grande. Alors que INDIAN SUMMERS peint la grande Histoire avec les petites histoires intimes. Il est donc possible de reprocher à LE DERNIER VICE-ROI DES INDES d’être trop pédagogique, trop informatif. Sauf qu’il y a une réelle volonté d’y détacher des personnages à l’intimité menacée. Il y a le couple interdit, dont la relation est mise à défi par le cours de l’Histoire ; puis le dernier vice-roi confronté à ses propres convictions, ce qui l’amène à devoir s’affirmer et reprendre confiance.

Gurinder Chadha est une cinéaste qui parle de réconciliations. Déjà en 2000 avec WHAT’S COOKING où des personnages à l’ethnicité différente sont réunis pour Thanksgiving. Ce film contenait déjà tout le travail de la cinéaste. Elle continua ensuite avec JOUE-LA COMME BECKHAM, COUP DE FOUDRE A BOLLYWOOD, etc… où elle met constamment en miroir des personnages anglophones et des personnages indiens (Inde). Ainsi, Gurinder Chadha peut établir deux points de vues historiques différents. Le point fort de la cinéaste est de ne jamais mettre en scène de « mauvais personnages ». L’idée est que chaque histoire intime s’influence, de faire ressortir l’intérêt humain dans chaque fait.

C’est là que la film diffère de la série INDIAN SUMMERS : le film de Gurinder Chadha traite pleinement le factuel pour aller y creuser des émotions humaines. C’est avec l’effet de miroir et aussi l’intérêt personnel envers les britanniques, que la cinéaste montre beaucoup d’honnêteté. C’est grâce à toute la sincérité de la mise en scène que le long-métrage est chaleureux et agréable à voir. Même si toutes les séquences à caractère pédagogiques sont de trop, le film met en scène des personnages aux portes de la souffrance permanente. Dans sa mise en scène, Gurinder Chadha oppose deux états : la recherche de stabilité par l’encrage physique dans l’espace (Hugh Bonneville souvent immobile, tente de s’imposer – le couple interdit qui tente de s’accrocher à une maison, à deux corps collés) contre le mouvement chaotique.

LE DERNIER VICE-ROI DES INDES est davantage un film d’ambiance qu’un film de mise en scène . Même si la mise en scène a quelques fulgurances, notamment dans son opposition citée précédemment, elle n’est que la cause du factuel. Par contre, bien plus que dans ses films précédents, la cinéaste a ici un vrai rapport avec le paysage. La dimension personnelle issue de la cinéaste se fait sentir dans le regard porté sur le paysage. Entre émerveillement nostalgique et énonciateur de bouleversement, l’esthétique explore la future division du pays comme un film qui s’étend et finissant par rompre. Loin de la carte postale, le film fait comme son récit : une division progressive de deux espaces, de deux ambiances. Le miroir finit par se briser, et la cinéaste nous propose d’être les témoins des milles morceaux.

LE DERNIER VICE-ROI DES INDES de Gurinder Chadha.
Avec Hugh Bonneville, Gillian Anderson, Manish Dayal, Huma Qureshi, Michael Gambon, Simon Callow, Om Puri, Lily Travers, Darshan Jariwala, Neeraj Kabi, Denzil Smith, Tanveer Ghani.
Royaume-Uni / Inde – 1h47 – 5 Juillet 2017

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