Batman v Superman, une mythologie fascinante mais prétentieuse

Arlésienne des super-héros, la rencontre attendue entre Batman (8 longs métrages) et Superman (7 films dont le précédent MAN OF STEEL) arrive enfin sur nos écrans en cette année 2016. Une gestation difficile, finalement accouchée après la relance par Zack Snyder des aventures de l’homme d’acier, qui se concrétise comme le premier vrai jalon d’une mythologie DC Comics au cinéma. Un vrai blockbuster avec des ambitions et une lecture bien plus froide du genre, mais qui se heurte à la vision d’un Snyder de plus en plus noyé dans une soupe numérique bien trop lourde.

Car oui, il va falloir s’accrocher pour suivre le récit. Reconnaissons aux auteurs du film (Snyder, mais surtout David S. Goyer déjà passé par la trilogie de Christopher Nolan, et Chris Terrio, ARGO) une volonté de marquer les esprits en se détachant clairement des films estampillés Marvel, plutôt fun et décontracté. A l’image des comics DC d’ailleurs, moins ancrés dans le réel et plus fascinés par l’image même du super-héros que ses histoires, BATMAN V SUPERMAN s’envole vers de grandes pensées philosophiques concernant leur place dans le monde, le pouvoir et l’impact de leur décision, de leur combat. Plus qu’un MAN OF STEEL bien terne, la rencontre est plus dans les mots que dans l’action. Fasciné par ces portraits, Snyder entremêle les identités civiles de ses héros et leurs costumes bariolés.

De ce point ce deuxième opus signé Snyder se révèle bien plus complet et intéressant que le film précédent. Si la figure de Superman reste toujours la plus problématique (comment rendre intéressant un personnage invincible ?), l’arrivée de Batman (convaincant Ben Affleck, tout comme Gal Gadot en Wonder Woman) et de méchants tels que Lex Luthor creuse la réflexion. Tous comporte une zone d’ombre, voir une part de folie qui complexifie les choses. Et leurs combats ne laisseront pas Sup’ de marbre. Difficile de faire dans la demi-mesure avec Snyder, et ses envies d’étaler au grand jour (ou de nuit, puisque quasiment tout se passe au coeur de scènes nocturnes difficilement lisibles) la psychologie de ses personnages virent rapidement des séquences prétentieuses et/ou inutiles. Alourdissant son récit, celui qui avait pourtant sur le même réussi à parfaitement condenser WATCHMEN ne semble pas parvenir à simplifier les choses. Difficile d’y voir clair sur 2h30 de film.

Les gros sabots de Snyder semblent exclure le spectateur qui, après une bonne heure de réflexion, s’intéressaient au récit. Difficile de suivre des personnages iconiques peu développés (on nous ressert, au cas où, une énième scène d’origine pour Batman, preuve que Snyder veut vraiment étaler sa science plutôt que d’aller à l’essentiel), tournant autour de questionnements philosophiques coincés entre deux déferlements d’effets spéciaux. La deuxième partie du film à ce titre se révèle extrêmement hasardeuse, véritablement foisonnement visuel outrancier (on connaît la finesse légendaire de son réalisateur, mais on l’a connu bien plus adroit) dont rien ne ressort.

Pas idiot dans le fond, BATMAN V SUPERMAN souffre dans sa réalisation à convaincre, récit coincé entre ses obligations de construire une mythologie (2 scènes quasi automatique en milieu de film nous donne des pistes sur les prochains films, là aussi sans trop de finesse), et l’ambition désormais trop grande de son réalisateur de livrer un film-somme… qu’il a déjà réalisé avec WATCHMEN.

2 / 5