Cannes NEXT – DVMobile au pays des merveilles (virtuelles)

Parmi la multitude de projets présentés à Cannes, il y a le Marché et NEXT, et puis quelques expériences présentées à la marge dans des salons privés. Parmi ceux-ci, c’est la société française DVMobile et son invitation à découvrir leur projet « Alice, The Virtual Reality Play » qui ont réussi à nous convaincre à travers une expérience virtuelle qui a tout compris au potentiel de ce nouveau support. Rencontre avec François Klein, producteur à DVMobile et auteur sur la réalité virtuelle.

A propos de DVMobile

DVMobile est un regroupement de compétences au sein d’un studio de création digitale : des directeurs artistiques, des auteurs, des réalisateurs, des codeurs, développeurs… Et si nous sommes à Cannes, c’est notamment pour le projet ALICE, une expérience théâtrale en réalité virtuelle qui brouille les frontières entre réalité et virtuel.

Produire des projets utilisant réellement les mondes virtuels

Nous sommes partis d’un état des lieux de ce qui existe et de ce que nous savons faire pour proposer quelque chose d’innovant. Nous cherchons toujours à surprendre le spectateur, et l’amener dans une expérience où il n’est plus vraiment passif, mais où on le laisse prendre du plaisir et exprimer ses sentiments. Alice est une histoire avec des interactions en temps réel avec des personnages virtuels, et une narration qui joue avec la frustration du spectateur. La mise en scène joue également sur les codes du théâtre à travers différents tableaux, différentes situations dans une continuité narrative à la temporalité libre puisqu’il est possible d’y rester le temps que l’on veut. Comme toute bonne histoire, il y a évidemment une fin. Notre but était vraiment de rendre actif le spectateur dans une fiction narrative.

Alice, une expérience participative ?

Ce qui fait le point fort de ce projet (réalisé avec beaucoup de caféine et peu de sommeil en seulement 6 semaines !), ), c’est l’implication forte d’un directeur artistique, mais aussi de collaborateurs avec des historiques forts dans les métiers de la communication, du théâtre et de la mise en scène : des compétences liées et diverses tant au niveau technique qu’en artistique. Nous souhaitions donner un aperçu du potentiel créatif de la réalité virtuelle, car on a la chance avec ce média de regrouper différents secteurs de création. Les américains ont bien compris l’importance d’une direction artistique sur un film de cinéma, par exemple. En France, on donne les pleins pouvoirs au réalisateur tant sur la ligne artistique que sur le scénario, alors qu’il n’est pas forcément scénariste ni directeur artistique. Le fait d’agréger ces différentes compétences sur des projets en réalité virtuelle permet de produire des oeuvres créatives nouvelles, comme nous le faisons avec ALICE.

La promesse du lieu pour la réalité virtuelle

La popularité des salles de réalité virtuelle, où le spectateur paie pour passer du temps dans différentes expériences, se fait croissante. Le marché est en train de se structurer, c’est un axe fort de développement. Les diffusions en Chine de films en 360 dans les centres commerciaux est aussi un signe fort. Avec ALICE, on veut avant tout montrer ce qu’il est possible de faire dans le cinéma traditionnel, en complément d’une projection classique par exemple. Comme une installation à découvrir avant une projection de blockbusters, ou autre film dans une thématique proche. On peut imaginer des sessions de réalité virtuelle qui créeraient des interactions avec l’histoire du film principal, en amont ou en aval.

Revoir le statut de producteur audiovisuel

Le travail de producteur doit effectivement se faire en collaboration avec le directeur artistique en amont du projet, ce qui n’est pas toujours le cas pour les films traditionnels. Mais cela renforce le statut de producteur, qui doit trouver l’équilibre entre les équipes et les pôles de compétences. Par exemple pour ALICE, il a fallu intégrer des technologies de jeu vidéo et connecter tout le monde dans un objectif commun de création. C’est aussi passionnant que difficile. Des projets VR à conseiller ?

Des projets VR à conseiller ?

Malheureusement, depuis 4 ans on a encore des gens qui s’interrogent sur la grammaire, la façon de raconter des histoires en réalité virtuelle. Au sein de DVMobile, nous avons produits plus de 150 projets en VR ou vidéos 360 pour différentes marques, et nous avons ainsi l’expérience de savoir ce qui marche ou non. Par exemple, produire des films uniquement avec des points de vue à la première personne, c’est possible mais attention : on va rapidement faire fuir les gens si on ne produit que cela. Idem avec les longs plans séquences. Tout doit être justifié, il y a des règles à respecter. L’an passé, j’ai ainsi regroupé les principes de base de la création en réalité virtuelle dans un livre intitulé « Réaliser son premier film en réalité virtuelle » (voir sur Amazon). L’objectif n’est pas de dire ce que doit ou ne doit pas être la VR, mais ce qu’il est possible d’en faire et surtout comprendre les techniques de réalisation pour produire de beaux projets. Les enjeux économiques sont aujourd’hui trop importants pour se lancer au hasard. Le marché commence à se structurer mais reste très fragile : il faut l’alimenter avec du contenu de qualité (en écriture et réalisation) pour inciter le public à revenir nous voir.